Une soirée tranquille sur le Vanzetti, à contempler le coucher du soleil

Stage Croisière – tous niveaux – Cadaquès (2/2)

Embarqué, bateau Salona 37

Samedi 24 mai – 7ème jour

Port de Roses -> L’Escartit

 

Après déjà 6 jours en mer, il est temps pour nous de faire un ravitaillement. Avec le reste de l’équipage, nous passons la matinée à préparer le planning de nos prochains repas et à faire les courses, sac au dos et cabas à la main. Nous traversons la ville pour rejoindre le marché couvert de Roses et faire nos petites emplettes de produits frais, dans un espagnol très incertain. Heureusement la plupart des commerçants parlent très bien français, nous évitant de grands moments de solitude. Pendant ce temps, Bruno nous prépare un bon petit plat et lorsque nous rentrons, c’est l’heure de passer à table. 

bord de mer de Roses

Bord de mer à Roses en Espagne en revenant des courses

A 15h pétantes, nous sommes sur le pont, habillés et en position pour le départ. Un zodiac de la capitainerie vient nous guider jusqu’à la sortie, nous épargnant gentiment un départ à la voile. Certes cela aurait été grandiose, mais il nous faut garder des forces !

La sortie du jour est orientée tourisme: nous allons longer la côte espagnole dans toute la baie de Rosas. L’exercice consiste à rester suffisamment proche de la rive pour pouvoir admirer le paysage, sans pour autant se prendre la quille dans le sable.

On s’éloigne d’abord du port de Roses en direction d’un immense paquebot de croisière à l’arrêt dans la baie. Cyril trouve ça drôle de nous faire passer juste à côté.

Je suis scotchée par la taille du navire. A côté, on se sent vraiment tout riquiqui dans notre coquille de noix. Il faut lever la tête pour voir le pont supérieur. Il est complètement désert à cette heure-ci, tous ses passagers sont descendus visiter Roses, excepté le capitaine qui nous fait un coucou depuis ce qui doit être la salle des commandes.

Dans la baie de Rosas, en approche d'un paquebot à l'arrêt

Dans la baie de Rosas, en approche d’un paquebot à l’arrêt

Une fois à bonne distance, nous bifurquons vers la côte et les immeubles d’Empuria Brava. Nous nous approchons tant qu’on peut clairement voir les vacanciers en train de se baigner ou de se dorer au soleil sur la plage. Heureusement, la densité de la ville laisse bientôt place à la nature, et la partie de « pas trop près pas trop loin » commence. Pour réussir ce petit jeu, nous utilisons la carte GPS sur la tablette, en définissant un « canal » duquel il ne faut pas sortir. Le barreur prend ses repères, et s’il dévie trop vers la côte ou le large, le GPS le rappelle à l’ordre avec un « BIP BIP BIP » tout à fait agaçant. C’est le cours de navigation le plus « high tech » auquel on a eu le droit aux Glénans, qui privilégient plutôt la navigation à l’ancienne, avec la carte, la règle de cra et le compas de relèvement. Du matériel fiable et qui ne risque pas de tomber en panne de courant. Ceci dit, c’est quand même intéressant de savoir ce qu’il est possible de faire avec les applis de navigation.

Le Canigou enneigé derrière les immeubles d'Empuria Brava

Le Canigou enneigé derrière les immeubles d’Empuria Brava

"Le paysage défile et nous suivons tranquillement la côte au-delà de la baie de Rosas."

« Le paysage défile et nous suivons tranquillement la côte au-delà de la baie de Rosas. »

Le paysage défile et nous suivons tranquillement la côte au-delà de la baie de Rosas. Le soleil se couche, embrasant la côte dans un spectacle ravissant. Nous arrivons devant l’Escartit dans un crépuscule avancé. Le vent baisse sérieusement et c’est dans un calme presque plat que nous allons mouiller face à la plage. Le sillage de notre bateau trouble à peine les lumières de la côte, posées en guirlande sur le miroir sombre de la mer.

Coucher de soleil en arrivant sur l'Escartit

Coucher de soleil en arrivant sur l’Escartit

Il est tard déjà, et je ressens un peu de lassitude. Après le repas, je m’exile sur le pont avec une infusion, pour profiter du ciel couvert d’étoiles. La douceur de la nuit m’apaise. C’est difficile de vivre en équipage, les uns sur les autres, à supporter ses propres défauts. Nos humeurs et nos ressentis sont exacerbés par la fatigue, le soleil, le stress, parfois les frustrations. On redécouvre de façon nette ses propres points sensibles. C’est dur des fois, mais tellement intéressant.

Dimanche 25 mai – 8ème jour

L’Escartit -> L’Escala

Il n’y a pas de vent ce matin, donc pas besoin de se presser. On s’est donné rendez-vous vers 10h. Motivée, j’ai préparé des pancakes aux pépites de chocolat qui ont mis tout le monde d’accord. C’était très réconfortant comme petit déjeuner. Puis comme on avait un peu de temps avant le topo, j’ai décidé que c’était le jour de la baignade, et j’ai enfilé mon maillot de bain et sauté dans l’eau ! C’est la première fois que je me baignais en stage, après presque 3 ans de voile !

J’ai été rejointe par le moniteur, qui m’a initié aux fantaisies de la « baignade croisière »: à savoir utiliser la bôme du bateau comme d’un plongeoir. J’ai eu les jambes qui tremblaient, mais je suis montée et j’ai sauté quelques fois, dans de grands éclats de rire. J’ai aussi été voir à quoi ressemblait l’ancre, posée dans le sable, à 5-6m de profondeur.

Je serai bien restée encore longtemps dans l’eau fraîche et douce, mais l’heure du topo était déjà bien entamée. Nous avons révisé les réglages fins de voile, avec les différents bouts, comment bien régler sa voile et comment savoir que c’est bien réglé.

Baignade et séance de plongeon depuis la bôme du voilier

Le Vanzetti, un Salona 37 des Glénans dans le port de Sète

Puis pendant que Flo et moi nous préparons à manger, nos collègues nous déplacent d’un mile ou deux pour aller mouiller à côté des îles Mendes, ou de nombreux bateaux sont déjà amarrés aux bouées pour profiter de la vue ou faire de la plongée dans ses eaux bleues profondes. Ce sont des îles sauvages, habitées exclusivement par des oiseaux. L’île principale est surplombée d’un petit phare qui nous a bien aidé en arrivant la nuit dernière.

La principale des îles Mendes avec son phare et ses oiseaux

La principale des îles Mendes avec son phare et ses oiseaux

J’hésite entre me baigner ou aller faire le tour de l’île en annexe avec Flo et finalement je me laisse tenter par le tour de l’île. Il nous faut ramer une heure et demi, mais les paysages en valent la peine. C’est sauvage, désert. Les goélands et les mouettes nous jouent le petit spectacle de leur vie, à faire des ronds dans l’eau, se nettoyer les plumes et atterrir dans la mer dans de grandes gerbes d’eau. La deuxième des îles Mendes est une falaise tel un géant se reposant dans l’eau.

C’était sportif mais très beau. J’ai eu mal aux bras.

bateau glénans salona 37

Le Vanzetti, un Salona 37 des Glénans dans le port de Sète

Nous revenons aussi vite que possible au bateau. Nous sommes attendus car il est déjà 18h30 et nous avons un peu de chemin à faire pour remonter vers le nord jusqu’à l’Escala.

Le vent nous porte jusqu’au cap puis s’adoucit de plus en plus au fur et à mesure que le soleil décline. Au coucher du soleil, nous sommes sur une mer d’huile, dans laquelle se reflètent les douces couleurs pastel roses et violettes du ciel. On n’avance plus très vite et la nuit va tomber. Le moniteur nous fait faire des petits exercices pour essayer d’avancer le bateau en attendant la prochaine risée. Mais je crois que c’était surtout pour nous faire patienter, et un peu se moquer de nous !

coucher de soleil sur le cap creus

Coucher de soleil sur le Cap Creus, vu depuis l’Escala

La risée arrive et nous pouvons enfin gagner les 3-4 nœuds qu’il nous fallait pour atteindre le port de l’Escala. Les marineros nous attendent au ponton essence pour nous aider à accoster à la voile. Cyril a la barre nous dépose tout en douceur contre le ponton, et je saute sur le quai avec mon amarre pour accompagner le bateau jusqu’à son emplacement pour la nuit.

Pendant que tout le monde range le bateau, je fini de chauffer le chili que nous avons préparé avec Flo avant d’arriver, et sur le coup de 23h30 nous mangeons. Je ne peux m’empêcher de bailler … fatiguée.

Lundi 26 mai – 9ème jour

L’Escala -> La Selva

 

Ce matin, encore des courses de ravitaillement pour les derniers jours. Le soleil nous tape fort dessus alors que nous revenons chargés des courses, sur le bord de plage. Florian et moi faisons une petite pause « gaufre » sur le chemin.

Après un repas léger de salade grecque et une petite sieste pour se remettre d’aplomb pour la nav’ tardive, nous quittons le port sur les coups de 16h. Grand-voile dehors, nous nous arrachons de notre place en faisant un magnifique demi-tour sur les amarres, pour se mettre sur la bonne route. Tout marche bien navette.

Nous traversons le golfe de Roses en plein milieu cette fois, avec un bateau plein de vigueur, d’abord au près puis, au fur et à mesure que le vent tourne, de plus en plus abattus. Nous sommes poursuivis par un sombre nuage venant de la côte, annonciateur d’une bonne averse. Mais il n’arrive pas à nous rattraper avant que l’on passe le cap Creus, et nous nous retrouvons à l’abri.

Florian qui profite du bon air marin ^^

Florian qui profite du bon air marin ^^

La côte Vermeille au delà du cap Creus

Les rochers saillants de la côte Vermeille au delà du cap Creus

Le vent baisse, et nous nous retrouvons à un nœud face à Cadaquès. De quoi profiter de la vue sur notre ville destination, que nous aurons contemplée de loin.

Dans ce calme presque plat, nous tentons de sortir le spi pour gagner un peu de vitesse. Il se gonfle fièrement quelques minutes, puis, timide, se replie sur lui-même. Nous affalons le gros ballon rouge avant qu’il ne décide de tomber à l’eau. Nous pouvons retourner à notre contemplation. Le rythme de vie et de croisière est vraiment très différent quand on a pas de vent et pas de moteur. On se retrouve livrés aux éléments, dans un espèce d’état second, ni de complet repos ni de complète attention.

Une soirée tranquille sur le Vanzetti, à contempler le coucher du soleil

Une soirée tranquille sur le Vanzetti, à contempler le coucher du soleil en attendant le retour du vent.

De toute façon, nous ne sommes pas très pressés. Pour entrer au port de la Selva, la capitainerie n’est pas très motivée pour nous aider à arriver à la voile, alors il nous faut attendre un bateau Glénans venant du nord qui pourra nous remorquer. Qu’est-ce qu’il ne faut pas faire pour avancer quand on a pas de moteur. Avec le vent qui devient nul, nous faisons des ronds dans l’eau devant la côte, dans la nuit tombante. Nous apercevons finalement des lumières vertes apparaître au loin, et à la VHF les copains répondent.

Trois quarts d’heure plus tard, voiles affalées, ballotés par les flots, le voilier ami nous rejoint. C’est un soulagement certain car la nuit commençait à être longue. Malgré la fatigue ambiante, nous réussissons à nous amarrer ensemble et le remorquage jusqu’au port peut commencer. L’autre voilier nous largue à quelques mètres du ponton, où nous allons nous échouer. Un tour de pendille plus tard, nous voilà amarrés, bientôt rejoint par le cortège de deux autres bateaux Glénans. Il y a foule sur le ponton pour cette heure tardive ! Les moniteurs discutent ensemble de leurs péripéties. Avec Flo, nous allons prendre un peu l’air sur un bout de ponton, avec une bière au citron, avant d’aller dormir.

Mardi 27 mai – 10ème jour

La Selva -> Argelès-sur-mer

 

La météo n’est pas vraiment de notre côté aujourd’hui encore. Il y a un peu de vent le matin, mais quand nous partons en début d’après-midi, c’est presque pétole. On était les derniers des Glénans, un peu abandonnés de tous. Les gars du port nous ont aidé à sortir, contre un petit billet pas très réglo, pour éviter qu’on ne tape d’autres bateaux. On a failli faire un massacre en larguant notre pendille, poussés par une risée contre le bateau d’à côté. Heureusement il n’y a pas eu de casse.

Une fois en dehors du port, il nous faut encore quelques heures pour réussir à s’extirper de la baie de la Selva, sans vent. Nous faisons contre mauvaise fortune bon cœur, en pensant aux gars du port qui doivent bien se marrer à nous voir faire du sur-place. Ça nous fait (un peu) rire aussi.

Le vent se lève, et nous pouvons envoyer un peu le spi pour gagner quelques nœuds. Nous profitons du vent tant qu’il y en a.

La nuit tombe quand nous passons devant Cerbère. Nous mangeons à la cape, devant le coucher du soleil. C’est bizarre d’être parti depuis si longtemps mais de toujours voir le port de départ derrière nous.

fin de journée sous spi près de Cerbère

Le Vanzetti, un Salona 37 des Glénans dans le port de Sète

Coucher du soleil sur le cap Béar

Coucher du soleil sur le cap Béar

Les étoiles sont en train de parsemer le ciel de leurs éclats lorsque nos voiles se regonflent. Cyril vise une arrivée au large d’Argelès-sur-mer pour le milieu de la nuit. La voilà, notre nav’ de nuit. Comme tout le monde a l’air motivé pour rester sur le pont et qu’il n’y a pas grand-chose à faire, je vais me reposer dans ma cabine, pour être un peu en forme pour prendre le relais vers une heure.

C’est un moment un peu compliqué, celui où on laisse le bateau entre les mains de autres. En tant que stagiaire on est pas vraiment responsable, mais il y a une forme d’impuissance à aller s’allonger à moitié à poil dans son sac de couchage pendant que les autres triment au-dessus de nos têtes. Cependant c’est un effort de relâchement nécessaire pour une longue nav’.

Avec le vent qui forcit, le tangage du bateau se fait plus fort. Nous remontons au près, je le sens car je suis complètement ramassé sur un côté de ma couchette. Hop, un virement de bord et je roule complètement de l’autre côté. J’entends tout d’ici. Les bruits de pas sur le pont. Les indications étouffées du capitaine. Les bouts et les morceaux de métal qui frappent la coque. Les crachotements de la VHF. C’est impossible de vraiment dormir mais j’arrive à somnoler. Je perds complètement le sens du haut et du bas, je ne suis plus qu’un tas de viande entortillé dans mon sac de couchage, reposant sur l’une des quatre faces de ma cabine, et pas toujours celle avec le matelas.

Vers une heure du matin, à peu près reposée, je sors ma tête de la descente, pour me rendre compte que nous sommes déjà en train d’arriver à destination. Je ravale ma déception et j’aide pour l’arrivée et pour ranger le bateau, en me disant que je sers au moins de soutien pour cette partie.

 

Les étoiles sont belles. Il est temps d’aller vraiment dormir cette fois.

Ambiance nav de nuit dans le bateau. On voit bien comme le bateau est gîté (penché), on entend le bruit des cordages.

Mercredi 28 mai – 11ème jour

Argelès-sur-mer -> Sète

 

Voilà, c’est notre dernière journée de vraie navigation aujourd’hui. Elle promet d’être longue jusqu’au port de Sète.

Nous partons sur les coups de 10h environ. Le temps est idéal et nous profitons d’un bon vent pendant une bonne heure. Vers midi, c’est pétole. En plein soleil, sans la moindre brise, la chaleur de l’été qui arrive se fait sentir et nous écrase.

Au mouillage devant la plage d'Argelès-sur-mer. Nous voilà revenu dans les Pyrénées-Orientales

Au mouillage devant la plage d’Argelès-sur-mer. Nous voilà revenus dans les Pyrénées-Orientales avec le Canigou en fond.

Puis le vent reprend et notre route aussi, rectiligne. Il n’y a pas grand-chose de spécial à faire à chaque minute, mais toujours un bateau à faire avancer au bon endroit. Je ne trouve de place pour rien d’autre dans ma tête que le bateau. Alors, allongée sur le passavant, bien attachée, je m’endors doucement avec le chapeau posé sur le visage, arrosée de temps en temps par une vague.

Petite sieste sur le passavant, en route vers Sète

Petite sieste sur le passavant, en route vers Sète

Florian à la barre le long de la côte Vermeille

Florian à la barre le long de la côte Vermeille

Le vent forcit et j’ouvre un œil. Je suis appelée en numéro 1 pour détacher le spi qui a décidé de faire trempette dans l’eau. Je me remets sur mes pieds en un instant. On s’y met à deux avec Marie pour remonter le sac du spi mais il est rempli d’eau et lourd comme une pierre. Cyril vient nous aider. Le sac menace de se déchirer à tout moment mais nous réussissons à le faire revenir sur le pont. Il n’y aura pas de spi aujourd’hui, c’est sûr.

Nous visons la colline d’Agde, bien visible au loin. Le jour s’étire. La colline de Sète apparaît à son tour. Ça sent la fin.

L'équipage du Vanzetti en route vers le port de Sète

L’équipage du Vanzetti en route vers le port de Sète

Il fait nuit lorsque nous arrivons devant le môle de Sète. On voit de gros paquebots aux pompes à essence. Les pontons sont minuscules à côté. Nous cheminons à la voile, il y a juste assez de vent pour nous pousser tranquillement. Personne ne répond à la capitainerie alors nous allons accoster comme on peut.

On dit souvent que c’est proche de chez soi qu’ont lieu la plupart des accidents. Lorsque la tension et l’attention commencent à se relâcher. La fatigue nous engourdit. Nous en avons eu un bel exemple cette nuit-là.

illustration myosotis et aster

Le bateau approche du ponton. René et Nathann sont aux haussières. Moi je suis parée à affaler la grand-voile. Les garçons sautent sur le quai, Nathann se précipite à l’avant et frappe son amarre. René va à l’arrière, mais son haussière est trop courte pour atteindre le taquet. Il a un instant d’hésitation et tente vraisemblablement de faire un tour mort malgré tout. Mon cerveau a un mal fou à réagir à ce qui suit. Comme happé par un fil invisible, René bascule par-dessus bord dans une galipette, suivit d’un grand « plouf ! » dans l’eau. J’arrête de respirer. Mes mains ne savent plus quoi faire. Et la grand-voile alors ? Cyril est le premier à réagir, il saute sur le quai et appelle de l’aide pour faire sortir René de l’eau. Il est couronné d’une belle fleur jaune, c’est sa brassière qui s’est gonflée lorsqu’il a touché l’eau.

Je n’ose pas bouger, j’ai trop peur de faire une bêtise. Il faut appeler les secours. Ça je sais faire. Je cherche mon téléphone, j’appelle les pompiers. Je ne sais pas quoi dire aux pompiers sur la blessure. Florian me souffle « petit doigt tranché ». Je n’ai rien vu encore, et je ne suis pas sûre de vouloir voir. J’ai du mal à leur expliquer où nous sommes car je ne sais pas précisément, mais merci google maps, ils finissent par trouver leur chemin jusqu’à nous. Je vais au bout du môle du port pour accueillir les secours et les guider dans le dédale de pontons. Il y a du monde sur le quai, quelques voisins de bateau, autour de notre compagnon.

Les pompiers embarquent René. Deux ou trois membres de l’équipage accompagnent le brancard jusqu’au camion, à l’extérieur du port. Je reste avec Bruno, et Cyril qui fait face à une petite crise de décompression post-accident. Décidément, il aura fait face à une quantité impressionnante de problèmes pendant ce stage. Nous rangeons le bateau avec précaution, un peu hagards. Les camarades reviennent. René est en route vers l’hôpital de Montpellier.

Il est minuit, nous sommes fatigués mais la faim, l’adrénaline et l’inquiétude ne sont pas de bonnes amies pour dormir. Les six restants, moins Marie qui reste seule au bateau, partons à la recherche d’un « quelque chose » qui serait encore ouvert à cette heure. Nous tombons sur un bar qui accueille notre petit groupe étourdi jusqu’à la fermeture. Nous parlons de choses et d’autres, comme pour se défaire un peu de la réalité.  A deux heures du matin, nous rentrons au bateau et improvisons du riz aux légumes pour caler nos estomacs affamés par tant d’émotions.

Après ça j’ai dormi comme un loir.

Jeudi 29 mai – 12 ème jour

Port de Sète

 

Malgré notre courte nuit et la fatigue, nous devons nous lever tôt pour passer les ponts de Sète. D’autres bateaux Glénans nous ont rejoint. Ils ont l’air aussi fatigués que nous. Un autre chef de bord vient prêter main forte à Cyril, qui se sent trop secoué par les évènements de la veille pour tout gérer lui-même. C’est une belle preuve de maturité.

Marie nous quitte là pour rejoindre René à Montpellier par le premier train. Nous ne sommes plus que 5. Le remorquage sous les ponts se passe bien. Le capitaine du bateau qui nous traîne engueule tous les bateaux qui arrivent en face, pour qu’ils nous laissent la place de passer.

Remorquage pour passer les ponts dans le port de Sète

Le Vanzetti, un Salona 37 des Glénans dans le port de Sète

Nous ne pouvons pas aller jusqu’au ponton Glénans sans notre moteur et sans remorquage du port, donc on s’amarre sur un ponton visiteur. Puis il faut enchaîner sur le traditionnel grand ménage du bateau de fin de stage. On vide les placards, on range nos affaires, on passe tout au désinfectant du sol au plafond, on vide et on nettoie les fonds du bateau, on récure les planchers. De vrais petits matelots.

L’après-midi est un peu entamée lorsque nous finissons de passer le pont à la moulinette. Le Vanzetti est propre comme un sou presque neuf. Nathann nous quitte à ce moment-là, après un rapide debrief de stage avec Cyril. Nous ne sommes alors plus que 4 à finir notre stage à l’ombre d’une terrasse, dans le centre-ville de Sète, attablés devant de belles salades italiennes. Cette fin de stage a un petit goût de vacances. Je me sens un peu plus proche de mes compagnons. Faut dire que de telles expériences, ça rapproche.

Ce stage aura été riche en enseignements. Bien que nous ayons bénéficié d’une météo clémente, ça ne nous a pas empêché de faire face à de multiples problèmes. Naviguer sans moteur aura été une expérience unique. S’adapter aux éléments, se débrouiller sans aucun appui. Si jusque-là j’avais pu penser que « le moteur, c’est de la triche », j’ai complètement revu mon jugement plutôt comme « le moteur, c’est une sécurité ». Et puis bien sûr, réaliser que les « attention les doigts » dans les taquets, les winchs, le piano, et bien c’est vraiment du sérieux, avec démonstration à l’appui…

Vient l’heure du bilan de fin de stage. Avec Flo, on n’a pas vraiment eu envie de refaire un stage « tous niveaux », car on a été un peu déçu de notre apport théorique. Mais Cyril nous a orienté vers un stage niveau 4. Ça y est, il semblerait qu’on soit prêt. On a émis l’envie de mieux comprendre comment prendre des décisions dans un bateau: quand partir, par où passer, comment décider qu’on envoie telle voile, … et il semblerait que ce soit le job d’un chef de bord de gérer ça.

Donc le prochain, ce sera un niveau 4 !

illustration myosotis et aster

– Fin du stage –

J’espère que vous avez passé un bon moment sur l’eau avec nous !

N’hésitez pas à nous laisser un petit mot, vos avis ou vos questions en commentaires ! 😊

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